Nom donné aux populations païennes, distinctes des Romains, à qui on attribue en particulier la construction des monuments en pierres sèches du Maghreb. Les Djohala sont parfois confondus avec les Beni Sfao et au Sahara central, en pays touareg, les monuments en pierres sèches (adebni*/idebnan) sont considérés comme les tombeaux des Isabaten* ou des constructions des Ijobbaren qui gravaient aussi des figures rupestres sur la « roche molle ».
2Les Djohala sont parfois concurrencés par les Ghoul (en pays arabophone) ou Waγsen (Kabylie) mais ceux-ci sont plutôt en relation avec des grottes profondes ou des sommets de forme particulière (« Serdj el-Ghoul » : la selle de l’ogre, dans les Babors), toutefois des allées couvertes sont considérées, en Kabylie (Aït Garet), comme les demeures du Waγsen, alors qu’à Aït Raouna, ces mêmes monuments sont attribués aux Romains, ce qui est exceptionnel.
3Les Djohala étant païens on n’a eu aucun scrupule à piller leurs tombes malgré la répugnance que manifestent généralement les populations rurales à l’égard de ces monuments qui inspirent, par ailleurs, de nombreuses légendes. Les Djohala étaient en général accusés de tous les vices imaginables. Dans les Monts des Maadid, ce sont des êtres incestueux qui furent punis par Dieu qui les couvrit de pierres et de sable. Dans le Dra (Sud marocain) on explique que les tumulus servaient d’abris à ces païens qui y emmagasinaient leurs vivres ; on leur attribue aussi la construction des plus vieilles tiγremt aujourd’hui ruinées. En Kabylie, une curieuse légende rapportée au milieu du xixe siècle par le capitaine Devaux, explique la forme des tumulus : les Djohala habitaient des maisons circulaires (alors que la maison kabyle est toujours rectangulaire) dont le toit conique était soutenu par un pilier central ; lorsque le chef de famille sentait la mort venir, il sciait le bas du poteau et se couchait, puis d’un coup de pied il renversait le poteau et se laissait enfouir sous les décombres, faisant ainsi un tombeau de la maison dans laquelle il avait passé sa vie.
4Dans l’Aurès, les Chaouïa savent qu’il y eut autrefois dans leur pays, des habitants différents d’eux-mêmes, ce sont ces Djohala qui construisirent les monuments mégalithiques du type « chouchet »* ; ils sont souvent considérés comme des géants en raison de la taille de certaines pierres utilisées dans ces constructions, qui se distinguent des ruines romaines.
5Les Djedars*, grands mausolées de la région de Frenda (Algérie occidentale, wylaïa de Tiaret) sont attribués aux Djohala dont on aurait retrouvé les squelettes.
Bibliographie
Devaux Cap., Les Kabyles du Djerdjera ou Etudes sur la Grande Kabylie, Paris, 1859, p. 203.
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de Puigaudeau O. et Senones M., « Vestiges préislamiques dans la région d’Assa (Basse vallée du Draâ) », Journ. de la Soc. des Africanistes, t. XXII, 1952, p. 7-15.
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