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8/14/2019

Mausolée royal de Maurétanie à Tipasa :Une histoire aux secrets bien gardés



Le mausolée royal de Maurétanie, communément appelé « le tombeau de la chrétienne », demeure une énigme historique et une source de fascination pour tous ceux qui s'y rendent. 
Ses dimensions pharaoniques, son aspect architectural harmonieux et sa résistance à l'usure du temps et aux agressions humaines, font de lui un inestimable patrimoine qui dévoile un pan de l'histoire antique.
Érigé sur une butte dominant la Mitidja au sud et offrant au nord une vue imprenable sur la méditerranée, le mausolée est situé dans la commune de Sidi Rached , à quelques kilomètres de la ville de Tipasa. A nos jours, aucune théorie n'est suffisamment étayée pour trancher la question de son ou ses bâtisseurs. 
Pour certains, c'est Cléopâtre Céléné épouse de Juba II qui y est enterré, d'autres, se basant sur les travaux d’archéologues, notamment ceux de Stéphane Gsell qui soutient que sa construction est antérieur à la montée au trône de Juba II, dans  la mesure où le chroniqueur et géographe Pomponius Mela (1er siècle ap J-c) avait repris un manuscrit de Varon décédé deux ans avant le début du règne de Juba II. 
Avec un volume dépassant les 80.000 M3, le mausolée marque une impressionnante évolution tant sur le plan esthétique qu'en termes de dimensions des bazinas, monuments funéraires répandus dans toute la région. Sa base de forme carrée mesure 63,4 m de chaque côté. Sa circonférence est de 185,5 m et son diamètre de 60,9 m. Sa hauteur est de 33 m. Dans la partie inférieure du corps du monument, de forme cylindrique, il est ornée de quatre fausses portes sous forme de trapèzes orientés vers les quatre points cardinaux. La partie supérieure de forme conique est constituée d’une juxtaposition de 33 gradins, chaque degré mesure 58 cm. 
C’est dire son immensité à l'image de la grandeur des anciens rois de la Numidie et de la Maurétanie. 
Et dire que Salah Raïs chef de la régence d'Alger avait failli en 1555 de détruire le mausolée à coups de canons dans sa folle quête au trésor. Son geste destructeur eut pour origine une légende racontant qu'une vache qui pénétrait par miracle dans le tombeau en ressortait le soir avec des bijoux sur ses cornes. 
Jusqu'à maintenant les traces de cette agression sont visible sur la partie Est du monument. Fermé durant les années 90 à cause de la situation sécuritaire, le passage à l'intérieur du mausolée a été rouvert au public durant le mois de Ramadhan dernier. 
Cette première qui s'était déroulée durant la soirée a drainé une foule immense. A l’intérieur, on peut cheminer dans une galerie au parcours circulaire jusqu'à parvenir aux caveaux. L'on s'attend prochainement à la réouverture des galeries intérieures du site, une fois sécurisées. 
En attendant, le projet de jonction entre le site et la voie express serait opérationnel d'ici fin août. Ainsi, les usagers de la route éviteront à effectuer tout un détour pour visiter les lieux chargé d’histoire et de mystères. 
Amirouche Lebbal

8/12/2019

La moule, un aspirateur à pollution sous la coquille



Sous sa coquille noire bleutée se cache une chair orangée savoureuse mais également... microplastiques, pesticides ou bactéries: la moule aspire tout, permettant de surveiller la qualité de l'eau, et aussi peut-être un jour d'aider à l'épurer."C'est un superfiltreur du milieu marin, avec jusqu'à 25 litres d'eau filtrés par jour", s'enthousiasme la biologiste marine Leïla Meistertzheim. "C'est un vrai modèle de bioaccumulation des polluants de manière générale", poursuit-elle.
Pesticides, bactéries, résidus de médicaments... Les moules qui pompent et filtrent l'eau pour se nourrir de phytoplancton, stockent au passage tout ce qui passe, d'où la nécessité de règles sanitaires strictes pour celles destinées à la consommation. Considérées comme des organismes "sentinelles" de l'environnement frappés dans les premiers par les contaminations, elles sont utilisées depuis longtemps comme "bioindicateurs" de l'état de santé des mers, lacs ou rivières qui les abritent. Des polluants encore mal connus pourraient s'ajouter à la liste des substances "surveillées" par les mollusques: les microplastiques et leurs additifs, comme le bisphénol A ou les phtalates.
Dans le cadre d'une campagne en cours de la Fondation Tara Océan, Leïla Meistertzheim et son équipe ont placé des nasses remplies de moules sur les côtes des estuaires de la Tamise, de l'Elbe ou de la Seine. Immergées pendant un mois, elles sont ensuite récoltées, disséquées, puis congelées ou lyophilisées, notamment pour compter les particules prises au piège et voir si certains additifs chimiques se retrouvent dans les tissus. L'idée de couvrir la mer de parcs à moules pour absorber ces microplastiques omniprésents n'est encore qu'un lointain mirage. Mais pour d'autres polluants, les processus sont bien plus avancés.
"A certains endroits, les moules sont utilisées, avec les huitres, comme des nettoyeurs du milieu marin, pour les pesticides par exemple", note Leïla Meistertzheim. Dans ce cas-là, les moules récoltées dans des eaux contaminées "ne doivent pas être mangées", souligne Richard Luthy, de l'université américaine de Stanford. Mais ce n'est pas toujours le cas, assure l'ingénieur environnemental, qui a également mis en évidence les capacités "de suppression et d'inactivation" de bactéries comme l'E.coli par des moules. "Les moules qui éliminent les bactéries fécales évacuent la bactérie sous forme d'excréments ou de mucus. Alors c'est bon", poursuit-il.
                                                         Recyclage  
Pas de problème non plus pour la consommation des moules installées dans des eaux victimes d'eutrophisation, rassurent les chercheurs. Cet excès de certaines matières nutritives, comme l'azote et le phosphore issus de l'industrie et de l'agriculture, entraîne une prolifération des algues qui s'en nourrissent, et un appauvrissement en oxygène qui étouffe l'écosystème. Les moules permettent une sorte de "recyclage" de ces nutriments en se nourrissant des algues en expansion "pour grossir et se développer", explique la chercheuse Eve Galimany, qui a participé avec le laboratoire Milford de l'agence américaine NOAA, à des expérimentations sur la rivière Bronx. Ce principe est déjà appliqué notamment par le projet "Baltic Blue Growth" qui soutient des élevages pilotes de moules destinées à l'alimentation animale, en Suède, au Danemark et dans les pays baltes.
"Cela pourrait être une partie de la solution" contre l'eutrophisation, qui est "un des principaux problèmes de la mer Baltique", assure la chef du projet Lena Tasse.
Si ce processus est sans risque pour l'Homme, pourquoi destiner ces moules à l'alimentation des volailles ou des poissons? Plus petites en raison de faible salinité de la Baltique, elles ne font pas recette chez les amateurs de coquillages, répond Mme Tasse. Quant aux impacts des microplastiques et de leurs additifs sur la santé humaine, ils sont pour l'instant très peu connus.
Selon un récent rapport de WWF, un être humain en ingère jusqu'à 5 grammes par semaine, soit le poids d'une carte de crédit, et on en retrouve dans tous les recoins de l'océan, y compris sous la coquille des moules. Se basant sur des échantillons de moules récoltés au Royaume-Uni, sur la côte ou dans des supermarchés, une étude parue dans Environmental Pollution en 2018, estimait qu'on ingèrerait 70 morceaux de plastique pour 100g de chair consommée. De quoi regarder ses moules-frites favorites d'un autre œil ? Pas pour Leïla Meistertzheim.
"Moi, j'en mange", lance la scientifique. "Le plat de moules n'est pas forcément pire que le steak haché bio emballé dans du film plastique"...