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1/29/2020

Il nous a quittés le 28 janvier 1983 Slimane Azem ou la magie d’un chanteur immortel


Trente-sept ans après sa mort, Slimane Azem reste le repère et le maître incontestable de la chanson kabyle. Ses chansons sont toujours aussi fraîches que lorsqu’elles furent composées.
Elles sont écoutées autant qu’il y a plus d’un demi- siècle alors qu’on retrouve de plus en plus d’artistes reconnus et d’autres débutants qui s’abreuvent de son riche répertoire, aussi bien poétique que musical. Slimane Azem a réussi à écrire son nom avec des lettres d’or sur la scène artistique kabyle. Certes, sa voix ensorcelante est pour beaucoup dans cette immortalité, somme toute prévisible, et dans l’amour que lui vouent ses fans, mais celle-ci n’explique pas tout. Slimane Azem a été aussi un poète digne de ce nom. Il a écrit des centaines de pages en vers. Ces derniers racontent et dépeignent magistralement tous les aspects de la vie des Algériens à son époque. Mais tels qu’appréhendés, ses poèmes sont toujours d’actualité car Slimane Azem leur a conféré, avec succès, un cachet non seulement intemporel, mais aussi universel. Il s’est beaucoup inspiré des Fables de la Fontaine dans une bonne partie de son œuvre poétique. Il a ainsi fait parler le chien, le chat, les oiseaux, le bœuf, la vache, le lion, etc. Il a fait camper des rôles à chacun de ses derniers, dans ses poèmes et ce, pour décrire une infinité de tableaux aussi bien concernant les sujets de société que ceux de la politique ou autres.
Car Slimane Azem était également un poète engagé à sa manière. D’ailleurs, en débattant de ses poèmes, ses fans n’hésitent pas à spéculer sur l’identité des personnes qui se cachent derrière chaque bête citée dans ses textes. Mais, dans la majorité des cas, il ne s’agit que de conjectures car il n’y a que Slimane Azem qui sait en réalité de qui il voulait parler.
Un poète engagé
Même les écrits académiques publiés sur l’œuvre poétique de Slimane Azem n’ont malheureusement pas pu être conçus en collaboration avec le grand poète d’Agouni Gueghrane qui aurait pu donner des pistes de lectures crédibles et beaucoup plus proches de la réalité. Et c’est presque le cas de tous les travaux de recherches consacrés aux grands poètes kabyles car ils ont été réalisés sans l’implication et l’association des premiers concernés. Mais ce sont peut-être ces zones d’ombre qui font, d’une certaine manière l’originalité des œuvres poétiques telles que celles de l’immortel Slimane Azem. Même si c’est toujours le côté poète qui a été mis en valeur quand il s’agit de parler de Slimane Azem, il n’en demeure pas moins que ce dernier a été également un musicien exceptionnel puisqu’il a composé des centaines de pièces musicales dont certaines ont séduit d’autres sommités de la chanson algérienne qui n’ont pas hésité à les reprendre à leur compte sous forme d’hommages.
Des chansons cultes
Les cas les plus connus d’artistes célèbres ayant repris une ou plusieurs musiques de Slimane Azem sont Matoub Lounès et Kamel Messaoudi et tout récemment Mohamed Allaoua qui a chanté la mélodie de la célèbre chanson «Amek ara nili sousta», en fusionnant les deux versions arabophone et kabylophone, car Slimane Azem, à l’instar de Salah Sadaoui, Akli Yahiatene, Cheikh El Hasnaoui ou Samy El Djazaïri, a chanté aussi bien en kabyle qu’en arabe. Parmi les poèmes de Slimane Azem en langue arabe, on peut citer : «Ana amir» ou encore «Amohand ou Kaci». Slimane Azem a également écrit et chanté des textes en langue française, surtout sur le thème de l’exil qui occupe une grande place dans son œuvre. Comme il s’agit d’un poète exceptionnel, les universitaires-écrivains lui ont consacré depuis son décès survenu le 28 janvier 1983, plusieurs livres dont certains sont d’une haute facture intellectuelle à l’instar du livre-référence en la matière : «Slimane Azem le poète», du grand chercheur Youssef Nacib. 
Une grande partie de ses poèmes a été également regroupé dans un livre actuellement épuisé intitulé «Izlan» et préfacé par le célèbre dramaturge et poète Abdellah Mohia dit Mohand Ouyahia. On peut aussi citer le livre «Brahim Saci sur les traces de Slimane Azem». Après le passage de 37 années depuis la mort de Slimane Azem, les chansons de ce géant n’ont pas pris aucune ride. On écouterait avec la même admiration et une égale émotion qu’il y a cinquante ans les célèbres «Amouh a Mouh», «Daghrib dabarani», «Ayafroukh ifireless», «Ldzayer athaâzizt-iw», «Atas ay sebreg», «A tamurt-in aâzizen», «Yekfa laman» et la liste est très longue.
Des poèmes pour la postérité
Chaque chanson de Slimane Azem est un livre. On peut l’écouter des milliers de fois sans s’en lasser et surtout sans pouvoir vraiment cerner toute sa densité et sa portée tant il s’agit de véritables puzzles complexes voire philosophiques, pour certains, que l’on peut interpréter de plusieurs façons. Aussi, en écoutant ses chansons innombrables sur l’exil, on ne peut se retenir d’avoir des larmes aux yeux, surtout si l’on est soi-même un exilé. Slimane Azem était d’abord et avant tout le poète de l’exil.

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