Le dossier des "Savoirs et savoir-faire des mesureurs d'eau des foggaras" du Touat-Tidikelt (Grand sud algérien) sera examiné mardi prochain à Port-Louis (Ile Maurice) dans le cadre de la réunion annuelle du Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel.
Le comité, dont les travaux seront ouverts par la DG de l'Unesco Audrey Azoulay, se prononcera, a-t-on précisé, sur sept demandes d’inscription sur la Liste du patrimoine culturel immatériel nécessitant une sauvegarde urgente, dont le dossier algérien, ainsi que 40 demandes d’inscription sur la Liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.
Le système des mesureurs d'eau (kiyaline el-ma), répandu dans les wilayas d'Adrar et de Tamanrasset, date de plusieurs siècles montre aujourd'hui des signes de recul dû essentiellement à l'abaissement du niveau de la nappe obligeant à recourir à des sondages et pompages profonds.
Dans une correspondance datée du 31 mars 2016, adressée au DG du Centre nationale de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques d'Alger (CNRPAH), le directeur de la culture de la wilaya d'Adrar a indiqué que ce système "ingénieux et pluriséculaire" qui fait partie de l'identité des populations sahariennes en général et de celles de la wilaya d'Adrar en particulier, est composé de "savoirs, de savoir-faire et de rituels renfermant de nombreux éléments du patrimoine immatériel transmis de génération en génération et allant dans le sens d'une gestion écologique des ressources de la nature et d'une exploitation rationnelle de la rareté de l'eau".
Il est recommandé, à cet effet, de sauvegarder, protéger et revivifier ce système qui comprend le creusement des foggaras avec des puits et des galeries les reliant, le partage de l'eau selon des modes de calculs connus et maîtrisés par la corporation des mesureurs d'eau (kiyalin el-ma) et l'irrigation des multiples jardins des palmeraies du sud de l'Algérie.
Le Comité intergouvernemental de sauvegarde du patrimoine culturel immatériel de l'Unesco est composé des représentants de 24 Etats parties à la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel (2003). Il se réunit une fois par an et assure le suivi de la mise en œuvre de cet instrument juridique ratifié par 178 Etats.
Dans ce métier de mesureurs d'eau, il y a d'abord les "foggaras", un système d'irrigation d'eau, qui sont formées suite à un creusement de puits jusqu'à une vingtaine de mètres de profondeur reliés par un canal souterrain permettant la circulation de l'eau.
Une fois arrivée à l'air libre, l'eau est mesurée par les "kiyaline el-ma" pour que chaque propriétaire de terre reçoive sa part d'eau en fonction du travail consenti pour le creusement et/ou l'entretien de cette "foggara". Enfin, l'eau est conduite dans des rigoles appelées "Séguias" qui les dirigent vers les jardins.
Les mesureurs d'eau, appelées également dans la région de Ghardaïa "oumana' essayle", calculent le volume d'eau de la "foggara", les parts d'eau de chaque propriétaire, percent les peignes répartiteurs d'ouvertures qui laissent passer le volume d'eau de chacun et renouvellent de ces opérations autant de fois qu'il est nécessaire durant l'année en fonction des différentes transactions sur l'eau: achat, vente, échange, partage entre ayants-droit lors d'héritages, etc.
Les calculs sont faits sur la base de données transmises de génération en génération, qui peuvent être à tout moment mises à jour, par un maître mesureur à ses apprentis. L'unité de mesure est la "Habba" qui correspond à un certain volume d'eau (une goutte). Les principales sous-mesures sont le "Qirat" (1/24ème de habba) et le "Quirat al-Qirat" (1/24ème de qirat).
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