Dans l’Afrique romaine, les points d’eau occupent une place importante quant au choix des principales implantations militaires établies dans la province la plus militarisée de l’Afrique romaine, la Numidie.
Il est évident que le choix de l’emplacement d’un camp ou d’un poste de surveillance ne dépend pas uniquement des considérations stratégiques et géopolitiques, mais certainement que l’emplacement devrait également répondre aux besoins en eau et en espace.
Le manque de précipitations en Afrique et notamment dans la zone pré-désertique de la Numidie, fait que les points d’eau soient rares et donc très convoités.
Il serait donc nécessaire de bien gérer cette ressource naturelle et vitale pour garantir une longue vie à l’installation militaire, via des aménagements hydrauliques. Ainsi, la légion et ses détachements peuvent assurer une meilleure gestion des exploitations agricoles.
Dans son «Abrégé des questions militaires», Végèce, écrivain militaire latin des IV et Vème siècles, expose les méthodes à suivre pour l’établissement d’un campement. Selon lui, il est primordial, étant dans le voisinage de l’ennemi, d’asseoir son camp dans un lieu où il doit y avoir du bois, du fourrage et de l’eau abondamment, sans pour autant de prendre un terrain inondable, ce qui pourrait causer de grandes pertes à l’armée.
Un autre auteur,Pseudo-Hygin, dans son oeuvre «Des fortifications des camps», du règne de Trajan, avait signalé la position défavorable des campements près d’un torrent qui pourrait, lors d’une crue subite, être inondés et anéantis, même si l’eau reste le seul et bon moyen pour conserver l’hygiène des troupes. La majeure préoccupation de ces traités militaires portaient sur la gestion des risques naturels, qu’ils soient la sécheresse ou les inondations.
Pour Végèce, les moyens les plus sûrs de se prémunir de la sécheresse, étaient de creuser des puits ou des citernes pour récolter les eaux de pluie.
La conduite des opérations militaires était véritablement influencée par les conditions météorologiques. D’ailleurs, dans la biographie de Marc Aurèle, dans l'«Histoire Auguste», il est mentionné comment l’armée romaine a été sauvée de la mort par la soif lorsqu’une pluie miraculeuse dérouta les Germains. A la suite de l’organisation militaire des confins sahariens et l’avancée vers le Sahara de la Numidie, la question de l’approvisionnement en eau se pose sérieusement, à partir du règne de l’empereur Hadrien (118-138). Pour toutes ces questions, le camp de Lambèse, achevé en 129 de notre ère, fut le principal établissement militaire en Afrique. le camp de la légion IIIe Auguste, établi au pied de l’Aurès à l’endroit qui s’appelait autrefois Lambaesis, qui se nomme aujourd’hui Lambèse(1). Et fut principalement alimenté par deux sources : Aïn Drinn, au Sud, dont le débit était de 20 à 30 litres/seconde. Son eau était acheminée par un aqueduc que les eaux empruntaient pour alimenter le Forum et les thermes du légat et des chasseurs.
L’autre source, à un kilomètre au Sud-Ouest, était Aïn Boubennana dont les eaux étaient acheminées via un aqueduc, en ligne directe, alimentant les fontaines et les réservoirs de la ville. Aussi, les petites résurgences d’Aïn Beida, dans le Nord de la ville avaient également été utilisées ainsi que les puits, aux environs de Oued Necheb. Les nombreux vestiges des travaux hydrauliques témoignent de la grande préoccupation des Romains quant à la gestion de l’eau. Il faudrait dire également que les 74 chantiers, dont 15 voués à l’hygiène et à l’installation des lieux de loisirs, demandèrent l’installation de 9 aqueducs et canalisations.
Au dessous de l’Aurès, dans la zone désertique, pour assurer l’organisation rationnelle du système d’irrigation et la distribution de l’eau, selon les prospections archéologiques affectuées par Gsell, les frères Guechtane ou encore celle d’Alquier, autour de la vallée de Oued El Arab, la concentration des vestiges romains est confirmée autour des cours d’eau où le problème de l’alimentation en eau dans la vallée a été résolu par la construction de canaux situés aux flacs des pentes, au dessus des fermes. Dans cette même valée, on copte les traces de 49 réservoirs et des aqueducs assurant le passage des canaux au dessus des ravins.
Les ouvrages hydrauliques dans la cité Lambèse répondaient parfaitement aux exigences d’une agglomération urbaine appelée à s’agrandir. A contrario, dans le massif aurasien, les travaux accomplis étaient au service des propriétés agricoles.
En conclusion, le contrôle des ressources naturelles d’une province romaine était toute une politique qui devait être bien maintenue pour assurer la pax romana (paix romaine).
babzman
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