L'hôpital du campement militaire à Oran, siège de l'association Santé Sidi El-Houari.
Le rapport de l’Algérie à son patrimoine architectural français évolue. À Oran, des habitants se sont constitués en association pour réhabiliter l’ancien hôpital du campement militaire qu’ils revendiquent comme partie intégrante de l’identité et de l’histoire algérienne. La moitié de l’hôpital a déjà pu être rénovée.
Oran est une ville portuaire du nord-ouest de l’Algérie. Fondée au Xe siècle par les Andalous, la cité porte les traces d’une longue histoire : présence romaine, dynasties arabo-berbères, occupations espagnole puis ottomane, et colonisation française.
En Algérie, les bâtiments historiques souffrent de la négligence des autorités algériennes en matière de préservation du patrimoine. Les monuments bâtis à l’époque coloniale, largement exclus de l’histoire et de la mémoire nationale, en pâtissent davantage. Mais selon Nabila Oulbesir, historienne de l’art et spécialiste du patrimoine, le rapport de la société algérienne au patrimoine qualifié péjorativement de "colonial", a évolué. D'une période de "nettoyage", de "purification de l'espace urbain des signes d'une histoire abolie", qui dénonçait la perte du savoir-faire artistique et architectural de style arabo-musulman, l’Algérie est passé à une période d'acceptation relative.
"Tout ce qui se trouve sur le territoire national fait partie de l’histoire algérienne"
L'association Santé Sidi El-Houari en est un exemple. Créée en 1991, elle a pour objectif de rénover l’ancien hôpital du campement militaire français, édifice de 6 000 m2 construit en 1838 sur des bains turcs. Leur démarche va dans le sens d’une réappropriation du patrimoine de cette époque et d’une transmission d’un savoir-faire comme l’explique Kamel Bereksi, président et membre fondateur de l’association.
L’hôpital du campement militaire français se situe dans le quartier populaire de Sidi El-Houari, un quartier très riche sur le plan historique mais aujourd’hui enclavé d’un point de vue économique et culturel. L’hôpital était dans un état d’abandon total dans les années 1990. Il était devenu une sorte de décharge publique. Nous avons décidé de travailler à sa réhabilitation. Nous considérons que le patrimoine colonial français fait aussi partie de notre identité. Certains voudraient la réduire à l’Occident, à l’Orient ou à l’islam. L’Algérie est une terre qui a été marquée par toutes les civilisations qui ont existé sur le pourtour méditerranéen. Tout ce qui se trouve sur ce territoire national fait partie de l’histoire algérienne. Aussi bien la partie coloniale que les autres histoires. Nous revendiquons et entendons réhabiliter ce patrimoine multiculturel.
"Nous avons recréé des métiers qui avaient disparu"
En 1991, lors de la période d’ouverture politique qu’a connue l’Algérie, nous avons crée l’association Santé Sidi El-Houari. Les années noires ont mis un frein à nos activités. Ce n’est qu’en 1999 que nous avons pu reprendre notre travail. Nous avons tenté de trouver des artisans capables de rénover ce site historique. Nous n’en avons pas trouvé. Les maçons en Algérie sont formés à la construction de cités nouvelles en béton, qui poussent comme des champignons. Les artisans spécialisés dans la taille de la pierre, la maçonnerie à base de chaux et de terre, essentiels à la restauration du bâti ancien et du patrimoine, n’existaient plus. Nous avons recréé des métiers qui avaient disparu.
Ensuite nous est venue l’idée de faire des formations, notamment pour les jeunes déscolarisés du quartier, à la rénovation et à la restauration du patrimoine. Le site de l’hôpital sert de chantier-école aux 450 jeunes avec lesquels nous travaillons. Nous avons également développé des formations pour les artisans de la région. En 2008, le wali d’Oran nous a conféré un arrêté de concession, qui signifie que nous avons tout le loisir de mener nos activités sur place – une belle reconnaissance de notre travail. Plus de la moitié du site est maintenant fonctionnelle. Nous y avons installé les locaux de l’école, des ateliers. Nous y organisons des activités culturelles dont peuvent profiter les jeunes du quartier. Le site accueille aussi un centre de dépistage des MST.
Nous espérons aujourd’hui avoir les moyens de poursuivre notre travail. Les montages financiers pour soutenir nos activités sont fragiles. Nous sommes sans fonds depuis trois mois. Et malgré une volonté officielle des autorités, des problèmes de gestion du patrimoine continuent à se poser. Il n’y a pas vraiment de bureaux d’études et très peu d’artisans formés à la réhabilitation des monuments. Pourtant la préservation de notre patrimoine si riche culturellement et historiquement demeure essentielle.
Le rapport de l’Algérie à son patrimoine architectural français évolue. À Oran, des habitants se sont constitués en association pour réhabiliter l’ancien hôpital du campement militaire qu’ils revendiquent comme partie intégrante de l’identité et de l’histoire algérienne. La moitié de l’hôpital a déjà pu être rénovée.
Oran est une ville portuaire du nord-ouest de l’Algérie. Fondée au Xe siècle par les Andalous, la cité porte les traces d’une longue histoire : présence romaine, dynasties arabo-berbères, occupations espagnole puis ottomane, et colonisation française.
En Algérie, les bâtiments historiques souffrent de la négligence des autorités algériennes en matière de préservation du patrimoine. Les monuments bâtis à l’époque coloniale, largement exclus de l’histoire et de la mémoire nationale, en pâtissent davantage. Mais selon Nabila Oulbesir, historienne de l’art et spécialiste du patrimoine, le rapport de la société algérienne au patrimoine qualifié péjorativement de "colonial", a évolué. D'une période de "nettoyage", de "purification de l'espace urbain des signes d'une histoire abolie", qui dénonçait la perte du savoir-faire artistique et architectural de style arabo-musulman, l’Algérie est passé à une période d'acceptation relative.
"Tout ce qui se trouve sur le territoire national fait partie de l’histoire algérienne"
L'association Santé Sidi El-Houari en est un exemple. Créée en 1991, elle a pour objectif de rénover l’ancien hôpital du campement militaire français, édifice de 6 000 m2 construit en 1838 sur des bains turcs. Leur démarche va dans le sens d’une réappropriation du patrimoine de cette époque et d’une transmission d’un savoir-faire comme l’explique Kamel Bereksi, président et membre fondateur de l’association.
L’hôpital du campement militaire français se situe dans le quartier populaire de Sidi El-Houari, un quartier très riche sur le plan historique mais aujourd’hui enclavé d’un point de vue économique et culturel. L’hôpital était dans un état d’abandon total dans les années 1990. Il était devenu une sorte de décharge publique. Nous avons décidé de travailler à sa réhabilitation. Nous considérons que le patrimoine colonial français fait aussi partie de notre identité. Certains voudraient la réduire à l’Occident, à l’Orient ou à l’islam. L’Algérie est une terre qui a été marquée par toutes les civilisations qui ont existé sur le pourtour méditerranéen. Tout ce qui se trouve sur ce territoire national fait partie de l’histoire algérienne. Aussi bien la partie coloniale que les autres histoires. Nous revendiquons et entendons réhabiliter ce patrimoine multiculturel.
"Nous avons recréé des métiers qui avaient disparu"
En 1991, lors de la période d’ouverture politique qu’a connue l’Algérie, nous avons crée l’association Santé Sidi El-Houari. Les années noires ont mis un frein à nos activités. Ce n’est qu’en 1999 que nous avons pu reprendre notre travail. Nous avons tenté de trouver des artisans capables de rénover ce site historique. Nous n’en avons pas trouvé. Les maçons en Algérie sont formés à la construction de cités nouvelles en béton, qui poussent comme des champignons. Les artisans spécialisés dans la taille de la pierre, la maçonnerie à base de chaux et de terre, essentiels à la restauration du bâti ancien et du patrimoine, n’existaient plus. Nous avons recréé des métiers qui avaient disparu.
Ensuite nous est venue l’idée de faire des formations, notamment pour les jeunes déscolarisés du quartier, à la rénovation et à la restauration du patrimoine. Le site de l’hôpital sert de chantier-école aux 450 jeunes avec lesquels nous travaillons. Nous avons également développé des formations pour les artisans de la région. En 2008, le wali d’Oran nous a conféré un arrêté de concession, qui signifie que nous avons tout le loisir de mener nos activités sur place – une belle reconnaissance de notre travail. Plus de la moitié du site est maintenant fonctionnelle. Nous y avons installé les locaux de l’école, des ateliers. Nous y organisons des activités culturelles dont peuvent profiter les jeunes du quartier. Le site accueille aussi un centre de dépistage des MST.
Nous espérons aujourd’hui avoir les moyens de poursuivre notre travail. Les montages financiers pour soutenir nos activités sont fragiles. Nous sommes sans fonds depuis trois mois. Et malgré une volonté officielle des autorités, des problèmes de gestion du patrimoine continuent à se poser. Il n’y a pas vraiment de bureaux d’études et très peu d’artisans formés à la réhabilitation des monuments. Pourtant la préservation de notre patrimoine si riche culturellement et historiquement demeure essentielle.
"Je suis fier d'avoir contribué à cette rénovation. J'admire sa construction, les charpentes, les planchers"
Abdelkader, 23 ans, ancien élève du chantier-école, est aujourd’hui formateur.
J’ai été formé au chantier-école en 2010-11. À l’époque, j’avais décroché de l’école à cause de problèmes familiaux. J’ai étendu parler des formations dispensées : la taille des pierres, la maçonnerie à base de chaux, les enduits de façades et intérieurs décoratifs, etc… Je me suis spécialisé dans la taille des pierres. C’est ce que je préfère. Je suis fier aujourd’hui d’être maçon. C’est le métier de nos ancêtres. Leurs souvenirs m’accompagnent. Aujourd’hui, je viens de devenir formateur. Je tiens à transmettre à mon tour ce savoir-faire aux plus jeunes. Il est précieux. Nous avons la chance d’avoir cette école à Oran.
Je suis fier d’avoir contribué à cette rénovation. J’admire sa construction, les charpentes, les planchers. Je connais tous ses détails architecturaux. Je connais moins son histoire. Je sais qu’il servait à soigner les militaires et les malades. J’ai encore beaucoup à apprendre. Peu importe qu’il soit un bâtiment construit par les Français. Il fait partie de notre patrimoine. Aujourd’hui, le bâtiment est devenu habitable. Et pour tout vous dire, ce serait un des mes rêves d’y habiter.
écrit
Abdelkader, 23 ans, ancien élève du chantier-école, est aujourd’hui formateur.
J’ai été formé au chantier-école en 2010-11. À l’époque, j’avais décroché de l’école à cause de problèmes familiaux. J’ai étendu parler des formations dispensées : la taille des pierres, la maçonnerie à base de chaux, les enduits de façades et intérieurs décoratifs, etc… Je me suis spécialisé dans la taille des pierres. C’est ce que je préfère. Je suis fier aujourd’hui d’être maçon. C’est le métier de nos ancêtres. Leurs souvenirs m’accompagnent. Aujourd’hui, je viens de devenir formateur. Je tiens à transmettre à mon tour ce savoir-faire aux plus jeunes. Il est précieux. Nous avons la chance d’avoir cette école à Oran.
Je suis fier d’avoir contribué à cette rénovation. J’admire sa construction, les charpentes, les planchers. Je connais tous ses détails architecturaux. Je connais moins son histoire. Je sais qu’il servait à soigner les militaires et les malades. J’ai encore beaucoup à apprendre. Peu importe qu’il soit un bâtiment construit par les Français. Il fait partie de notre patrimoine. Aujourd’hui, le bâtiment est devenu habitable. Et pour tout vous dire, ce serait un des mes rêves d’y habiter.
écrit
par Dorothée Myriam KELLOU,
journaliste à France 24.
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