Je crois savoir que les historiens algériens s’interrogent sur les origines du drapeau national algérien actuel. Disons tout de suite qu’ils manquent d’informations et qu’ils pataugent. A titre personnel je vais essayer d’apporter ma contribution pour leur faciliter la tâche.
Après des débuts difficiles, l’ENA s’implante bien en France. Qui plus est, l’ENA est en relation avec d’autres mouvements coloniaux qui comme nous revendiquent leur indépendance. Le Mouvement vietnamien et tout particulièrement syrien et libanais sont des partis frères, rencontres, réunions et manifestations à Paris ensemble sont choses courantes avec cette particularité est que l’émigration algérienne est conséquente.
Au début des années 1930 la direction de l’ENA décide de créer son propre drapeau. Ce drapeau est vert frappé d’une étoile et d’un croissant blancs. C’est le drapeau de l’Etoile Nord Africaine. Il parait maintes fois dans les réunions du parti, il défile de temps à autre dans les manifestations du parti dans les rues de Paris.
Mieux, comme l’émigration algérienne est majoritaire outre le drapeau de l’Etoile Nord Africaine, les militants quand c’est nécessaire, défilent aussi avec les drapeaux syriens et libanais dans les rues de Paris qu’ils soient de kabylie ou du sahara peut importe. Ce colonisé-ci vaut bien ce colonisé-là et nous sommes tous frères en but au même colonialisme.
Il faut se souvenir que Messali Hadj et sa petite famille arrivent à Alger le 2 aout 1936. Après avoir livré son combat au Congrès Musulman nous allons tous à Tlemcen et nous nous installons dans la famille Mamchaoui où Madame Messali et son rejeton restent près d’une année tandis que Messali Hadj après une tournée de propagande à travers l’Algérie revient à Paris.
Durant toute cette période Madame Messali participe aux activités du parti à Tlemcen. C'est là qu’elle coud à la machine le drapeau de l’ENA qui deviendra PPA le 11 mars 1937 qu’elle a connu à Paris. A l’époque, flics, mouchards, indicateurs et perquisitions sont autant de constantes qui font parties de nos habitudes. L’on peut dire que tant qu’il y a des femmes courageuses pour cacher le drapeau sur leur poitrine, l’espoir est permis, en la circonstance ce fut le cas.
Cependant, la prudence nous incite à cacher ce drapeau ailleurs que chez nous et la décision est prise d’aller l’installer à Sidi Boumedienne dont le grand père est le gardien. Il trouve sa place à l’intérieur du mosolé parmi les étendards religieux.
Sa première apparition publique eut lieu le 14 juillet 1937 à Alger. Pour ce faire, un tlemcénien étrangé au parti l’amena sans savoir ce que contenait le paquet qu’il transportait. Les issues de la gare d’Alger étaient surveillées en conséquence pour qu’il ne nous échappe pas sans le vouloir. Rapidement il arrive au champ de manœuvre où il est déployé à la tête du cortège du PPA.
Là, une algérienne étrangère au parti voit pour la première fois depuis 1830 un drapeau qui pourrait être l’emblème nationale, émue et impressionnée, elle se déchausse et d’autorité elle se place devant le drapeau et ouvrira la marche du cortège. L’on peut dire qu’elle a été la première algérienne PPA inconnue. Bien évidemment, le drapeau du PPA disparait à la dispersion du cortège.
Le 2 aout 1937, Messali Hadj et la direction du parti sont arrêtés et incarcérés à Barberousse. Kahal Areski, Secrétaire général du PPA arrive de France pour prendre sa place dans le combat quelques jours après il rejoint la direction du PPA à Barberousse. A Tlemcen, Marouf Bournedienne, responsable du PPA organise dans une grange une réunion pour dénoncer l’arrestation de la direction du parti. A cette occasion le drapeau vert frappé de l’étoile et du croissant blancs réapparait et va vite rejoindre sa cachette.
Kahal Areski à Barberousse est atteint d’une grave maladie et décède à l’hôpital Mustapha d’Alger. Sa dépouille est conduite à la rue Cerventes à Belecourt chez Ahmed Bouda.
Madame Messali est présente et décide impromptu que son cercueil doit être recouvert du drapeau du parti. Elle se rend chez un marchand de tissus, achète tout ce qu’il faut et revient pour se mettre devant une machine à coudre. C’est ainsi que Kahal Areski originaire de Guinzette sortira recouvert du drapeau vert frappé de l’étoile et du croissant blancs du PPA.
Pour cet acte, elle sera inquiétée et se rendra au Palais de Justice d’Alger accompagnée de Messali Hadj qui venait d’être libéré de Barberousse pour une quinzaine de jours.
A la déclaration de la guerre, Messali Hadj, dirigeants et responsables du parti sont arrêtés à travers toute l’Algérie ils sont une quarantaine incarcérés à la prison militaire d’Alger. Ici, le PPA entame la pire période de son existence. Outre une répression maximale, les hommes sont mobilisés. Dans Alger et sa proche banlieue il y a tout au plus une centaine de militants PPA qui forment le carré et qui sont les gardiens de la flamme du patriotisme algérien.
C’est l’époque où un jeune étudiant en médecine, un certain Lamine Debaghin s’occupe de loin du parti, en effet il se doit de terminer ses études. Cette situation se perpétuera jusqu’en avril 1943 où responsables et dirigeants sortent de la prison de Lambèse pour être astreints à résidence forcée.
Durant toute cette période, loin de nous tout problème de drapeau. Le drapeau existant était toujours celui de l’Etoile Nord Africaine et du Parti du Peuple Algérien, vert frappé d’une étoile et d’un croissant blancs.
Désormais la situation politique évolue en Algérie et nous nous dirigeons vers les AML, les Amis du Manifeste et de la Liberté. Celle-ci permet auPPA de prendre un nouvel essort et de résoudre bien des problèmes.
Durant cette période que le problème du drapeau national algérien est abordé et résolu par la direction du PPA d’alors.
Donc le premier drapeau de l’ENA-PPA comme le drapeau national algérien actuel vert blanc frappé d’une étoile et d’un croissant rouge n’a jamais été conçu par une personne seule, l’un et l’autre ont été l’œuvre de la direction du parti.
La preuve de mes propos sont concrétisés par le fait que Belhafaf porte drapeau de la manifestation du 1er mai 1945 à Alger, tombera criblé de balles parce qu’il tenait précisément le drapeau national algérien vert, blanc, frappé d’une étoile et d’un croissant rouges à la rue d’Isly en cette occasion.
Messali Ali.
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