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9/13/2016

Le commerce des peaux de mouton : Un créneau juteux



Le commerce des peaux de mouton connaît un "dynamisme"  certain à Oran avec la célébration de l’Aïd-el-Adha, synonyme, tradition oblige, d'immolation de nombreuses bêtes. Cette fête religieuse est devenue, ces dernières années, une source de revenus pour les jeunes qui se sont "spécialisés dans ce type d'activité saisonnière. 

 A chaque Aïd-el-Adha, de nombreux commerçants se livrent à une concurrence féroce pour acquérir ces peaux auprès des citoyens afin de les revendre à des tanneries. Celles-ci se chargent de les transformer en matières premières utilisées dans la fabrication de produits en cuir, ou exportés vers certains pays européens  et asiatiques. Ce type d’activité commerciale est exercé par des jeunes, devenus au fil des années expérimentés dans la collecte des peaux de mouton pour les  vendre aux bouchers, à certains abattoirs et tanneries locales. Nombreux sont, en effet, les Oranais qui ne désirent plus garder ces peaux pour décorer leur foyer. Disposer d'une ou de plusieurs peaux de mouton chez soi n’est plus à la mode.  Mahieddine est un jeune qui s’adonne à cette activité depuis des  années. A chaque Aïd, il tient à acquérir une grande quantité de ces peaux pour  les revendre à des tanneries, à des prix variant entre 300 et 500 dinars la pièce. Il doit, cependant, d’abord laver les peaux, les nettoyer avant de couvrir leur surface avec des quantités considérables de gros sel pour les préserver de la pourriture.
          

Le "produit" emballé dans des sacs en plastique est ensuite cédé aux  tanneries          

 L’opération de collecte de ces peaux de mouton, plus connues à Oran sous le nom de "btana" ou  de "hidoura", débute dès l'après-midi du premier jour de l’Aïd. Les "marchands" sillonnent les différents quartiers et les zones à  forte densité de population, à la recherche de personnes désirant se débarrasser des encombrantes peaux. Les revendeurs les acquièrent gratuitement auprès des citoyens ou les récupèrent carrément dans les poubelles, avant le passage des camions de ramassage des ordures. Ces toisons intéressent également certains comités chargés de la  construction de mosquées dans différentes localités de la wilaya d'Oran. Les peaux, une fois vendues aux tanneries, constituent  un revenu supplémentaire contribuant à la concrétisation du projet. De nombreux citoyens cèdent également leurs peaux de mouton à ces comités pour contribuer à cette action sociale. D’autre part, les "opérateurs" versés dans ce créneau assurent que les produits collectés à l'occasion de l’Aïd-el-Adha représentent la grande part des quantités de cuir exportées à partir de la capitale de l'Ouest algérien. Le bilan de la Chambre de commerce et de l’industrie de l’Oranie indique que le volume total des exportations de cuir a atteint plus de 217.000 unités, soit environ 199 tonnes au cours du premier semestre de cette année. 

Ces marchandises, exportées principalement vers la France, l'Italie,  l'Inde et la Turquie par des entreprises privées spécialisées dans ce type d'activité, occupent la première place des exportations oranaises hors hydrocarbures, souligne-t-on. "Hidoura", un élément essentiel de décoration intérieure, avec sa forme plate et sa couleur d’un blanc éclatant, est un des éléments essentiels de décoration intérieure des maisons de certaines familles oranaises qui tiennent à perpétuer les traditions ancestrales. 

C’est avec la laine extraite de ces toisons que sont fabriqués les matelas traditionnels. Disposer d’un de ces matelas est un signe de fierté pour de nombreuses femmes, surtout les plus âgées, qui se vantent d’avoir fabriqué leur lit de leurs propres mains.  Les vieilles Oranaises gardent toujours en mémoire leurs rencontres  particulières au lieu-dit Guessaa, à la cité la Calère donnant sur la pêcherie d’Oran.  

C’était l’endroit préféré pour de nombreuses femmes qui se réunissent  dans une ambiance conviviale, marquée par la joie de la célébration de l’Aïd-el-Adha, pour préparer la btana. Elles utilisent le sel pour faire sécher la peau et éviter qu’elle ne pourrisse, et l’alun pour son assouplissement et pour  lui donner une odeur particulière, avant qu’elle ne serve d’objet de décor ou de couche. Hadja Meriem, installée actuellement à haï El-Yasmine, regrette ces temps-là. Elle se souvient que les femmes venaient à la Guessaa, à l’aube  du troisième jour de l’Aïd, pour répondre aux besoins de nombreux clients des autres quartiers de la ville qui viennent solliciter leurs services contre une modique somme ne dépassant les 40 dinars pour chaque peau traitée. 

Ces mêmes "préparatrices" approvisionnaient jadis le marché de M’dina J’dida, où des marchands proposaient des peaux de mouton, préparées à la manière traditionnelle.  Cette activité a presque disparu aujourd’hui, avec la diversification  du marché des matelas et de son expansion.        
Aujourd’hui, de rares femmes s’adonnent encore à cette activité, chez  elles et loin des grands centres urbains. À Aïn El-Beida, Es-Sénia et Hassi Bounif, entre autres, certaines femmes continuent d’exercer cette activité pour subvenir aux besoins de la vie quotidienne et s’assurer une autre source de revenus.
Ces femmes participent à la préservation d'un art ancestral qui résiste encore aux vents de la modernité.

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