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7/24/2016

Les randonnées d’Aliouat Tiaret, terre de préhistoire et d’histoire

Tiaret est sans conteste l’une des contrées les plus importantes de la préhistoire d’Afrique du Nord, comme l’attestent les vestiges encore visibles et les gravures rupestres de Djebel Amour. 
Ensuite Tiaret deviendra un royaume berbère qui s’opposera aux Romains, ceux-ci y ayant édifié un poste militaire important au IIIe siècle. Il faudra attendre le VIIIe siècle pour voir la naissance de Tihert la neuve, fondée par Ibn Rustom qui, fuyant les orthodoxes musulmans, sera accueilli par les tribus locales qui le nommeront imam. 
La cité – qu’on présente comme le premier Etat musulman d’Afrique du Nord – connaîtra vite un grand essor et une notoriété qui dépassera largement ses frontières. Son rayonnement était tel qu’on venait d’Egypte, d’Irak et de Perse pour étudier dans ses mosquées. Tihert était aussi un carrefour commercial reconnu et des négociants y venaient d’Europe et de toute l’Afrique. 
A l’évidence, cette prospérité attisera bien des convoitises et la cité tombera entre les mains des armées fatimides. Jusqu’à l’invasion française qui verra l’Emir Abdelkader transformer la cité en place forte avant qu’elle ne soit rasée par l’armée coloniale qui y construira la nouvelle ville de Tiaret. Pourtant, durant six ans–de 1864 à 1870– les tribus des Ouled Sidi Cheïkh feront de la résistance et en 1881, Bouamama libérera même Frenda. La suite sera semblable à toutes les régions d’Algérie qui n’auront de cesse d’opposer une résistance farouche à une armée coloniale suréquipée, et Tiaret ne fera pas exception. 
A l’indépendance, la cité offrira la physionomie de quasiment toutes les autres cités d’Algérie avec la vieille ville d’un côté et la moderne de l’autre. 
Là où les tuiles envahies de lichen contrastent avec la rutilance des façades vitrées des immeubles flambant neufs. C’est dans un café de la vieille ville que nous avons rendez-vous avec notre ami de longue date, Bentabet (c’est son prénom). 
C’est toute la magie du service national que de regrouper des êtres de toutes les contrées de cet immense pays. Alors dans le froid et l’endurance se forment de solides amitiés et personne n’aurait jamais cru qu’un jour on reverrait Bentabet dit « Tiarti », un bidasse d’une grande philosophie et d’un humour décapant. Il a un peu neigé dans ses cheveux et des rides témoignent d’épreuves qu’il a dû traverser. Il nous propose une balade dans les montagnes qui cernent la ville. 
En allant récupérer sa voiture, nous passons par la vieille mosquée. Un joyau architectural construit en 1870 par une main-d’œuvre turque et financé entièrement par les tribus arabes de la ville. Un magnifique monument tout de pierre ocre où l’on sent une réelle sérénité dès qu’on en franchit le seuil. La route serpente vers la montagne et entre deux souvenirs de caserne, Bentabet nous indique les lieux-dits de la ville qui s’étend majestueuse. Là c’est Ibn Khaldoun qui a choisi son ermitage pour méditer sur l’histoire des peuples. Ici c’est Ibn Rustom qui a fondé son royaume, et là-bas, aux limites du territoire c’est l’Emir Abdelkader qui livra de rudes batailles contre l’oppresseur. Nous sommes émerveillés par le paysage tout de forêts et de verdure. Bentabet nous apprend que la région recèle des sites archéologiques uniques comme en témoignent les nombreux dessins rupestres. Toute la région de Tiaret recèle d’un très vaste champ archéologique riche de vestiges romains et berbères (dont les célèbres mausolées appelés Djeddars) notamment à Frenda, Sidi Hosni et Tihert l’ancienne. 
A ce sujet, de plus en plus de chercheurs et d’historiens s’accordent à émettre la thèse qu’en Afrique du Nord, le couscous est apparu dans la région de Tiaret comme l’attestent les fouilles archéologiques qui ont révélé la présence d’un couscoussier datant du IXe siècle. Alors à l’évidence, Bentabet nous invite à déguster un couscous. Avec les mêmes légumes que ceux servis dans toute l’Algérie, des pois-chiches, des courgettes, des navets et bien entendu la viande d’agneau. Un régal. Avec le café, on nous sert le baghrir, l’une des spécialités de la région. Des crêpes de semoule, arrosées de miel et de beurre. 
Certaines vieilles familles offrent le baghrir le matin des noces. Ce sont les mêmes traditions que l’on retrouve à l’Est où, dans certaines contrées, la mariée mange leghrief, chez les Chouias, ou el korsa, chez les Constantinois. Cela relève de la sociologie culinaire. C’est aussi cela l’Algérie, de Tiaret à Khenchela, de vieilles traditions qui ont toujours cours.
A. A.

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