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1/11/2016

Dis-leur - Inasen

A ceux que le vent a emportés
Le vent de panique qui a soufflé
Porte-leur mon message
Dis-leur ceci :

Que la malédiction est partie
Qu’ils peuvent maintenant revenir
Au pays nous avons trouvé un guide
Parmi les hommes rares qui nous sont restés
Son père est Kabyle des montagnes
Sa mère est Arabe des Chleuh
C’est un vrai dirigeant
Nous n’admettrons de le perdre
A sa venue les brumes se dissipèrent
Au pays, il saura insuffler une âme

Dis-leur, la malédiction est finie
De nos querelles, plus de traces
Dis-leur que nous les attendons
Le pays a besoin de ses enfants

Dis-leur de revenir
Chacun sa place l’attend
Chez-eux, avec les leurs, ils s’uniront
Et se réjouiront avec leurs enfants

Dis-leur, la porte est ouverte
Abattues les palissades
Toutes les voies sont libres
D’ étrangers, le pays regorge toutes les saisons
C’est par milliers qu’ils affluent

Dis-leur de revenir
De l’arbitraire, plus de trace
Le despotisme qu’ils ont connu jadis
L’on n’évoque même pas son nom
Les tyrans d’hier
Et tous les geôliers
Dans le droit chemin, ils sont revenus
Et ont compris leurs vraies missions
L’armée est dans les casernes
Les fusils ne sont plus que rouilles
Ni tueurs, ni tués
Les tordus sont redressés
Nous sommes sortis des ténèbres
Nos infortunes sont effacées
Ceux qui ont pris le maquis
Grâce à Dieu, ils ont revenus au droit-chemin
Guidés par les bienfaiteurs
Il n’y a plus de chômeurs
Le peuple entier travaille
Nul n’est plus dans la détresse
Sur chaque visage, la paix est répandue
Le bon grain domine l’ivraie
Les récoltes débordent
Le paysan se remet à travailler sa terre
A vendre et à récolter
Et même les journaux
Ont appris à dire la vérité

Dis-leur, la paix est enfin là
Au printemps, elle a donné rendez-vous
Tous les vœux sont exaucés
Tout ce dont nous avons longtemps rêvé
Dis-leur de revenir
S’ils pouvaient voir les villes
La beauté qui les accueillera
Dans chaque rue empruntée
Ils ne verront et humeront
Que la rose et le jasmin
Des filles et des garçons
Main dans la main
Vont ensemble à l’école
Le kabyle est enseigné
Au même titre que l’arabe et le français
Chacun l’aime et l’apprend
N’avons-nous par les mêmes ascendants?

Dis-leur que ce n’est pas tout
Il y a tant de choses encore
S’ils pouvaient voir les mosquées
De bons musulmans, emplis
Fraternels et tolérants
Acceptant l’Eglise chrétienne
Les Juifs ont repris leurs commerces
Avec eux, nous sommes frères
A Constantine, son pays
Enrico est marchand de luths
Dis-leur qu’à leur arrivée à la capitale,
Avec fleurs et sourires
Ce sont les gouvernants
Qui les accueilleront
Ils verront que tout a changé
Un peuple serein et gai
Ils trouveront bénédiction et sagesse
Combien de lui, ils seront contents
Les cœurs blessés guériront
Neufs, ils en deviendront
Oubliées les affres de l’exil
Des malheurs, ils seront lavés
Ils commenceront une nouvelle vie sur leur terre, elle s’épanouira


Revenez, si vous ne me croyez
Vous verrez de vos propres yeux
Les fous tels que nous
Ont droit de délirer
Ce que j’ai dit n’est qu’utopie
Utopie de ceux qui rêvent toujours
Nous avons tous ici nos rêves

Ramenez-nous vos rêves, à vous
Apportez-nous vos rêves
Dans l’aire des rêves, nous les rajouterons
Il y a ceux qui les battront
Du mélange naîtra le discernement
Le battage une fois achevé
Le bon grain sortira de l’ivraie
Je suis mauvais

Je suis donc si mauvais !
Vous, vous êtes si bons
Vous, les destructeurs
Vous mes semblables
Nous sommes donc si mauvais
Bons, sont ceux qui cassent les adages
Et si je ne veux pas dire
Descends, mon Dieu que je monte
Mieux que toi, je sais
Je suis mauvais

Sommes-nous dans un conte de fée ?
Pourtant l’arbitraire se fait battre
Sur les nobles, le silence est tombé
Laissant les dépravés, sasser
Si je ne chante pas les morts
Si je ne me nourris pas de cadavres
Je suis mauvais

De patience nous nous sommes armés
A notre réveil, tous a changé
Les ignorants, s’enorgueillissent
Les sages adoptent le profil bas
Si je suis des pudiques
Si je pèse mes serments
Du mauvais regard, je suis visé
Je suis mauvais

J’ai trouvé l’aigle blessé
Le corbeau prenait les commandes
J’ai vu pleurer l’abeille
La guêpe l’a délogée
Si je refuse de quitter ma maison
Si je refuse de m’exiler
Et si à ma terre je m’agrippe
Je suis mauvais

Eux préfèrent les tyrans
toi, tu résistes
Chaque fois que tu vas de l’avant
Ils te relèguent en arrière
Si je compatis avec les malheureux
Si j’aime ceux les gens honnêtes
Je suis mauvais

De l’injustice, ils ont pris racine
Si elle n’existe, ils la créent
Derrière nos malheurs, nous nous sommes murés
De ceux qui agressent et se plaignent
Si je suis contre l’injustice et la corruption
Si de l’envie je suis l’ennemi
Et si je ne dérange la quiétude des autres
Je suis mauvais

A ceux qui adorent les tombes
Vous y cherchez votre salut
vous portez tout cet intérêt à la mort
Et la vie, vous l’ensevelissez
Si je dédaigne la mort qu’ils me souhaitent
Si je refuse qu’ils me tuent
Pour qu’ils puissent faire de moi un bœuf de battage
Je suis mauvais

Si tu portes la malédiction
Alors pour eux, tu es un homme
Si tu fais le lit de l’intrigue
Alors ils t'élèveront sur l’échelle de la gloire
Si je ne fais flèche de tout bois
Si je refuse d’être un alêne
Et si de la louve, je ne tiens pas
Je suis mauvais

Dieu, viens-nous en aide
Pour les mauvais jours qui s’annoncent
Sera-t-elle un jour sauvée ?
De ceux qui frappent et n’intercèdent point
Si je suis du côté du juste
Si j’enrobe mes mots de vérité
Et si je veux que le jour se lève pour nous
Je suis mauvais


  Lounis Aït Menguellet

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