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11/12/2015

Le monde végétal : un stock énergétique planétaire

A l’échelle de la planète, le tapis chlorophyllien des terres émergées qui reçoit 1 530 1018 kcal n’utilise que 30 1018 kcal qu’il transforme en 130 milliards de tonnes de matière organique chaque année. Le rendement moyen est de 14 t de matière sèche par hectare. En considérant que chaque gramme de matière sèche végétale contienne une énergie égale à 18kJ (4,32 kcal), le potentiel énergétique net sera de 5 616 1015 kcal, soit 864 fois les besoins énergétiques alimentaires des 6,5 milliards d’humains. Un chiffre qui donne beaucoup d’espoirs et qui laisse entendre que le couvert végétal cache un vrai trésor énergétique, qu’il conditionne la biodiversité et protège les sols de la dégradation et l’atmosphère de la sursaturation en dioxyde de carbone.
La biomasse végétale annuelle est de l’ordre de 200 Gt de matière sèche pour le globe dont 65% proviennent de la biosphère terrestre et 36% de l’hydrosphère. Sur ce total d’énergie primaire, on prélève chaque année une part pour l’alimentation, une part pour le bois et le papier, une autre part pour le chauffage... Avant que le produit photosynthétique n’atterrisse dans l’assiette du consommateur, il aura beaucoup perdu de sa valeur initiale et il aura nécessité encore plus d’énergie de transport, d’emballage, de stockage et de « cuisinage ». Entre la production et la consommation, beaucoup de calories vont au rebut, un grand gâchis, c’est sans doute à ce niveau qu’il reste encore des efforts à faire afin de valoriser le maximum avant de se tourner vers des solutions purement agronomiques.
Connaissant la répartition des surfaces chlorophylliennes, on peut estimer l’offre énergétique annuelle de chacune des occupations des terres. A l’échelle planétaire, sur les 15 Gha, les forêts occupent 4,1 Gha, l’équivalent de 69,7 1018 kcal, elles disposent du plus grand potentiel énergétique et donc de la capture la plus significative du CO2 atmosphérique, sachant qu’il y a une tonne de carbone dans 3,66 tonnes de CO2 et qu’une tep solaire fixerait une tonne de carbone. Les prairies 3,1 Gha (52,7 1018 kcal) arrivent en seconde position et enfin les terres arables 1,6 Gha (27,2 1018 kcal). En Algérie (238 106 ha), la surface agricole totale qui n’occupe que 3% de la surface du pays offre théoriquement moins de calories (142,8 1015 kcal) que les steppes et les parcours s’étalant sur 14% (666,4 1015 kcal), les forêts 2% représentent la source la plus faible (95,2 1015 kcal).
Les terres improductives dominent la surface du pays avec 81%. Si on regarde de plus près le potentiel de l’agriculture algérienne, on se rend compte que ce sont les cultures herbacées avec 3,8 millions ha qui disposent de la plus large manne calorifique (76 1015 kcal), suivies des plantations fruitières (576 990 ha) avec 11,54 1015 kcal, le vignoble (81 550 ha) offre 1,6 1015 kcal et enfin les prairies (23 640 ha) avec 0,47 1015 kcal. Un hectare de prairie naturelle recevant la valeur annuelle moyenne du rayonnement solaire produira 6,2 tonnes d’herbe sèche pour un potentiel énergétique de 1,9 106 kcal.
Le rendement peut cependant monter jusqu’à 3 ou 4% pour les cultures du type blé, maïs ou pomme de terre. En moyenne, l’énergie solaire produit par hectare en un an, environ 1 t d’herbe, 4 t de feuilles, 5t de bois et 2 t de racines, variable selon la latitude, l’altitude, la pluviométrie... Un champ (1ha) de blé donnera 16,7 t de matière sèche dont 6,5 t de grain, 7,5 t de paille et 2,7 t d’éteule (ce qui reste sur champ). Dans le cas du maïs bénéficiant annuellement de 510 tep/ha (5,1 milliards kcal/ha) d’énergie solaire qui sont convertis en production de 16 t de matière sèche dont 1/3 de grain (5,1t). Pour obtenir ce potentiel énergétique, les travaux au champ ont consommé de l’énergie en tracteur, en engrais, en semence, en irrigation, en pesticides et enfin en transport et séchage pour un total de 1,5 à 2 tep.
La plus-value énergétique est 8 tep (219,2 103 kcal/j) soit la ration de 80 personnes. Il faut cependant souligner que le régime alimentaire contient de plus en plus de calories animales, ce qui exigera davantage de surfaces chlorophylliennes, sachant qu’il faut 5 à 10 fois plus de surface pour produire la même nourriture sous forme animale que sous forme végétale. Cette dernière étant elle-même tributaire de la ressource fossile, puisque une calorie végétale nécessitera 0,2 à 0,5 calorie fossile. Il faut 2 à 10 calories fossiles pour produire une calorie sous forme de lait ou de viande soit 200 g de pétrole pour 1 kg de blé ou encore 6 kg de pétrole pour 1 kg de viande. La production phytosynthétique spécialement agricole est soumise à des limitations qui lui sont intrinsèques et extrinsèques.
Les premières sont d’ordre biologique et génétique et elles peuvent êtres améliorées par les techniques de sélection, d’hybridation et de manipulations génétiques. Les contraintes extrinsèques sont de deux ordres, d’abord les facteurs sur lesquels l’homme n’a pas de prise (lumière et CO2…), ensuite notre influence parfois néfaste (déboisement, surpâturage) mais parfois bénéfique comme l’irrigation-drainage, la fertilisation…, cependant onéreuses. Malheureusement, ces efforts sont souvent gaspillés aux 2/3, ils se traduisent par l’insuffisance des connaissances du monde rural, l’inadaptation des techniques. L’agriculture mondiale consomme 0,4 Gtep d’énergie fossile (machinisme 40%, irrigation 11%, engrais 31%, pesticides 18%), soit 4% de la consommation mondiale.
En moyenne dans le monde, 26,9% de la consommation en énergie primaire est utilisée par l’industrie, 25,8% par les transports, 39,3% par le résidentiel et le tertiaire et uniquement 8% par l’agriculture.

Manger pour vivre

Les besoins énergétiques alimentaires sont estimés en théorie pour l’ensemble de l’humanité (6,5 milliards d’humains) à 6,5 1015 kcal. Les besoins énergétiques d’un individu sont définis comme étant la quantité d’énergie nécessaire pour compenser les dépenses et assurer une croissance et une composition corporelle compatible avec le maintien à long terme d’une bonne santé et d’une activité physique adaptée au contexte économique et social (OMS, 1996). Les dépenses énergétiques sont liées au métabolisme de base qui représente 60 à 70% de la dépense totale, l’activité physique avec 20 à 30% occupe le second poste de dépense et enfin la dépense liée à la thermogenèse. La dépense énergétique globale d’une personne varie avec l’âge, le sexe, le poids et l’activité.
Les enfants de 2 à 9 ans évoluant avec des masses corporelles de 12 à 30 kg consomment quotidiennement entre 1 100 à 2 100 kcal. Les femmes ont une dépense individuelle de 2 200 kcal/j alors que les hommes exigent en moyenne 2 700 kcal. Le PNUD a évalué ces derniers temps, la consommation moyenne individuelle à 2 782 kcal/jour. Une valeur qui augmente à plus de 3 300 kcal pour les individus bien nourris des pays développés et chute à moins de 1 600 kcal pour les plus démunis, alors que le seuil de la suffisance alimentaire est fixé par cette même instance à 2 700 kcal. Cette énergie alimentaire est contenue dans la biomasse qui regroupe toute matière organique végétale ou animale. Une énergie extraite de la ration alimentaire, constituée de lipides (9 kcal/g), de glucides (4,9 kcal/g) et de protides (4,9 kcal/g).
On parle souvent de l’équilibre 421GPL c’est-à-dire, 4 portions de glucides, 2 portions de protides et 1 portion de lipides. Dans la matière végétale, ce sont les substances organiques qui contiennent de l’énergie, ce sont elles qui brûlent lors de la combustion, par exemple du bois qui permet de chauffer. Des exemples ont montré que 1g de matière sèche végétale contient une énergie de 18 kJ (4,43 kcal), ce qui équivaut à l’énergie libérée par une ampoule de 100 w pendant 3mn. Par ailleurs, il faut 16 kg d’alimentation végétale pour le bétail pour faire 1 kg de protéine de viande. Le rendement thermodynamique de l’animal étant faible, il faut en moyenne 7 calories d’origine végétale pour obtenir 1 calorie sous forme de viande.

Consommation

La consommation annuelle d’énergie (en 2002) dans le monde a atteint 8 000 millions de tep avec une part individuelle moyenne de 1,6 tep soit 1,6 107 kcal. Les plus gâtés sont les habitants des pays de la péninsule Arabique, avec en tête le Qatari avec 19,9 tep/hab, soit 202 fois la moyenne, loin après vient l’Américain avec 8 tep, ensuite le Français avec 4,4 tep, le Japonais (4,06 tep), l’Algérien (0,985 tep), le Tunisien (0,846 tep), le Marocain (0,363 tep) et en bas du tableau on trouve les plus démunis comme le Yéménite (0,22 tep) soit 7 fois moins que la moyenne, le Malgache (0,2 tep) et le Bangladais (0,15 tep). Bien que l’espace qui regroupe les pays de la péninsule Arabique est majoritairement dépourvu de couverture chlorophyllienne, n’empêche que les habitants sont de gros consommateurs d’énergie, ils profitent de cet héritage millénaire de l’activité photosynthétique concentré dans le pétrole et le gaz stockés dans leur sous sol.
La valeur énergétique des aliments consommés au niveau de la planète représente environ 500 à 600 mégatep par an, soit 5 à 6% de la consommation d’énergie primaire mondiale (10 Gtep). Le potentiel de la photosynthèse est vaste, encore faut-il avoir plus d’intelligence de le conserver, le développer et l’exploiter.Pendant plusieurs générations, l’homme s’était contenté des fruits, du gibier et de ce que la nature lui offrait de mets, voilà ce qu’il avait comme sources d’énergie qu’il transforma en force musculaire et en énergie cérébrale. Ce n’est qu’à une époque relativement récente qu’il maîtrisa le feu et devint un véritable pyromane en brûlant d’abord du bois, inventa l’agriculture et en cultiva les céréales tout en domestiquant certains animaux pour profiter de leur force. Plus tardivement, l’usage des moulins d’abord puis de la vapeur, ont apporté à l’homme une capacité supérieure à sa seule force musculaire.
Puis ce fut l’ère du combustible fossile, charbon d’abord puis pétrole et gaz. Tout est brûlé. Récemment à l’échelle de l’humanité, l’usage de l’énergie électrique a facilité son transport sur de longues distances. Enfin depuis à peine un demi siècle, il a réussi à produire de l’énergie nucléaire. Le long de ce parcours, l’homme n’a cessé d’augmenter sa dépense énergétique mais le plus grave c’est ce mode de vie (urbain) auquel il est arrivé qui est à l’encontre de la nature. De nos jours, on commence à parler et à concevoir des villes écologiques dans l’espoir d’atténuer la dégradation de la biosphère.
Cet exposé souligne le rôle fondamental de la photosynthèse qui regroupe à elle seule toute la problématique de l’environnement. La biosphère ne peut exister sans la photosynthèse qui combine l’énergie solaire, l’eau, le sol, le végétal et l’atmosphère. Les cycles de l’eau, du dioxyde de carbone y sont très liés. Il est clair que la manière dont nous saisissons les propriétés, les mutations et les combinaisons de l’un et de l’autre de ces éléments oriente notre compréhension relative au fonctionnement de ce monde, de la plus simple brindille vivante aux changements climatiques planétaires.
Z. l. : Professeur
Notes :
- 1- Paillotin G. (2005). Que peut on espérer de la photosynthèse des végétaux ? Académie française d’agriculture, France.
- 2- Wurmser R. (1926). La loi de l’équivalent photochimique dans la photosynthèse chlorophyllienne. Le journal de physique.
- 3- Ngo C ., Bonal J. (2006). La biomasse. Omniscience
- 4- Robert M. (2002). La séquestration du carbone dans le sol pour une meilleure gestion des terres. FAO
- 5- Bazzaz F., Sombroek w.G. (1996). Global climate change and agricultural production. FAO Site web AREVA-COGEMA- Bilan radiatif photosynthétiquewww.ordiecole.com/biol/photosynthese

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