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7/09/2014

La foggara en Algérie : un patrimoine hydraulique mondial

Localisée dans les régions arides, la foggara en Algérie, le qanat en Iran, la khettara au Maroc et le falj au sultanat d’Oman constituent des procédés d’acquisition et de distribution d’eau, basé sur des galeries horizontales drainantes. Cependant, ces techniques traditionnelles, si elles présentent des similitudes au niveau du système de captage (galeries et puits), montrent des différences au niveau de la source de captage et de la technique de partage de l’eau.
À travers cette étude, basée sur des sorties de prospection dans cinq oasis du Sahara algérien et des enquêtes menées au niveau des oasiens, on a pu recenser sept types de foggaras. Il s’agit de foggaras qui captent les eaux de la nappe phréatique au pied d’un djebel ou de la nappe du Continental Intercalaire, d’une source de la nappe du Grand Erg Occidental, de drainage et des infiltrations, et enfin, uniquement les eaux de crues (foggara de Mzab) ou drainent les eaux des oueds.


1. Introduction
Le système des galeries drainantes est connu dans le monde sous plusieurs appellations. Il s’agit de la foggara en Algérie, de la qanat en Iran, du falj au sultanat d’Oman, du kariz en Afghanistan et au Pakistan, de la khettara au Maroc, de la qanat romani en Jordanie et en Syrie, du kanerjing en Chine et de la kriga en Tunisie. Ce sont là des noms pour désigner le même principe de fonctionnement, basé sur les galeries drainantes. Elles sont réparties dans plus de 30 pays à travers le monde (BOUSTANI, 2008). C’est la qanat qui constitue la plus ancienne technique; elle a été réalisée depuis plus de 3 000 ans et c’est le nord-ouest du plateau iranien qui est considéré comme le foyer d’origine de ces galeries (CRISTINI et LANGLAIS, 2004; GOBLOT, 1979; WESSELS, 2005). Plus de 50 000 qanats étaient en exploitation en Iran (GHORBANI, 2007). Aujourd’hui, il ne reste que 22 000 qanats fonctionnelles, dont la longueur totale des drains avoisine les 250 000 km (WULF, 1968). La plus longue qanat a une galerie d’une longueur de 50 km et se trouve dans la région de Kerman. Le falj se localise dans la partie nord du sultanat d’Oman. Les aflajs ont été développées il y a plus de 2 000 ans (zaher bin khalid et al., 2007). Actuellement, il ne reste que 3 017 faljs fonctionnels sur un total de 4 112, qui drainent un débit de 680 millions de m3•an-1 pour une longueur de 2 900 km (AL GHARFI et al., 2000). Contrairement aux qanats qui puisent l’eau des nappes souterraines, il existe trois types de faljs :
  • Le falj Ghaili qui capte les eaux des oueds. Il représente 49 % des aflajs d’Oman.
  • Le falj Aini qui capte les sources naturelles pérennes. Il représente 28 % du total des aflajs.
  • Le falj Daoudi qui puise l’eau des nappes phréatiques au pied des montagnes. Il représente 21 % du total des aflajs.
2 Dans le Tafilalet au sud du Maroc, les khettaras étaient au nombre de 300 au début du XXe siècle, pour environ 450 km de galeries. Elles se concentrent sur la rive droite de l’oued Ghriss et au nord-est du Tafilalet. En l’an 2000, il ne restait que 150 khettaras fonctionnelles (BEN BRAHIM, 2003).

3 Il est très difficile de situer avec précision le point de départ de la foggara. Connue sous le nom de qanat en Iran, khettara au Maroc (PNUD, 1986), ngoula ou kriga en Tunisie et sahridj au Yémen, la foggara est une technique de captage des eaux qui a pris naissance en Iran selon GOBLOT (PNUD, 1986). La qanat, qui alimentait Ibril en Perse, a été construite à la fin du VIIe siècle avant J.-C., ce qui atteste des origines très lointaines de ce type de captage. Dans le Sahara algérien, les foggaras auraient été introduites au XIe et XIIe siècles par El Malik El Mansour, qui aurait creusé la première foggara à Tamantit (à 15 km d’Adrar) (HASSANI, 1988). Ensuite, les foggaras ont été développées dans le Touat et le Gourara par des tribus arabo-berbères du sud marocain (Mrabtine, Chorfa) sur la base de l’esclavage de la main-d’oeuvre noire (Harratine) locale ou provenant des régions voisines du Mali, du Niger et du Soudan (ARRUS, 1985).

4 La plus grande foggara de la région de Timimoun est celle d’El Meghier (à 200 km d’Adrar). Elle a été forée à une époque qu’on ne peut préciser et aurait été développée par le Marabot Sid Othmane et son fils, qui vivaient au IXe siècle de l’hégire (REMINI et ACHOUR, 2008).

5 Que ce soit la qanat, la khettara, le falj ou la foggara, toutes ces techniques ont le même principe de fonctionnement; il s’agit de captage des eaux à l’aide des galeries drainantes munies de puits d’aération. Cependant, la source d’eau captée diffère d’un procédé à l’autre. La qanat et la khettara captent les eaux de la nappe phréatique au pied des montagnes, une partie du falj capte les eaux de source et une autre partie du falj capte les eaux des oueds. En Algérie, lorsqu’on parle de la foggara, on parle automatiquement des foggaras du Touat, du Gourara et de Tidikelt, qui captent les eaux de la nappe albienne. Plusieurs auteurs, notamment KOBORI (1982) et GAILLERMOU (1993), ont beaucoup cité ce type de foggaras dans leurs études et travaux. C’est dans le but de mettre en évidence les différents types de foggaras qui ont participé à donner la vie aux oasis du Sahara algérien que cette étude a été menée.

2. Définitions
La foggara signifie, en arabe, Fakara (creuser). Certains auteurs croient que cette expression provient du terme arabe El Fokr (la pauvreté). Celui qui creuse une foggara se trouverait en effet dans l’obligation d’y investir tellement, qu’il finirait par tomber dans le besoin avant d’en bénéficier. Par contre, d’autres auteurs croient que le mot foggara est relatif à Fakra, la vertèbre en arabe (KOBORI, 1982).
7 La foggara est une galerie souterraine légèrement inclinée, qui draine l’eau de l’aquifère en amont vers les terrains les plus secs situés en aval, en direction de la palmeraie. Ce procédé utilise un système de galeries en pente douce d’une longueur pouvant atteindre les 20 km, équipées d’une série de puits d’aération espacés de 5 à 22 m, dont la profondeur peut atteindre 20 m (Figure 1). La distance minimale entre les foggaras est de 80 m (CHEYLAN, 1990).
Méthodes et enquêtes
La foggara est une technique liée à un système social de travail collectif, mené par un comité de sages, appelé Djemaa, dont le rôle est de diriger et de surveiller l’entretien de la foggara et la répartition de son eau.
Cette étude a été basée sur des sorties sur le terrain et des enquêtes effectuées auprès des oasiens et des propriétaires de foggaras. Plus d’une vingtaine de sorties de prospection ont été effectuées durant la période 2006 à 2008, dans les oasis situés à la périphérie du Grand Erg Occidental. Des foggaras vivantes et abandonnées de 20 oasis ont été prospectées. Il s’agit des oasis de Moghrar (Naama), Boussemghoune (El Bayadh), Timimoun, Adrar, Beni Abbes (Bechar), Tabalbala (Bechar), Lahmar (Bechar), Taghit (Bechar), Wakda (Bechar), Beni Ounif (Bechar), Ouled Said (Timimoun), Kali (Timimoun), Ghardaia
La foggara de l’Albien
La foggara de l’Albien, appelée « foggara classique », est la plus connue et la plus décrite par les auteurs. Ce type de foggara se localise dans le sud-ouest du Grand Erg Occidental, dans les régions du Touat, de Gourara et de Tidikelt, où le plateau de Tadmait constitue un véritable château d’eau. En effet, la nappe albienne profonde est rapprochée de la surface dans la périphérie du plateau grâce au creusement des galeries souterraines de la foggara; ces galeries pénètrent dans la partie supérieure de la nappe de grès du Continental Intercalaire à la périphérie du plateau de Tadmait. Ces galeries assurent un écoulement par gravité vers les dépressions basses où se localisent les palmeraies et les jardins. On dénombre dans les régions du Touat, de Gourara et du Tidikelt, environ 820 foggaras en service actuellement, dont le débit avoisine 2,8 m3•s-1, et une longueur totale de 2 000 km. Les oasis du Touat comptent 531 foggaras, dont 358 en activité (DUBOST et MOGUEDET, 1998). Les superficies irriguées par cette technique varient entre 7 000 ha et 3 000 ha, dont la production agricole est très variée : dattes, céréales, légumineuses, cultures maraîchers et fruitiers (KESSAH, 1998). Pour ce type de foggara, l’écoulement est continu toute l’année. Il y a interruption de l’écoulement dans le cas d’un effondrement d’une partie de la galerie ou d’un rabattement rapide, provoqué par l’installation d’un forage près de la foggara.

La foggara de l’Erg
La foggara de l’Erg capte les eaux de la nappe qui se forment au-dessous du Grand Erg Occidental, grâce à l’eau qui s’écoule lentement sous l’Erg, dans les anciens cours d’eau en provenance de l’Atlas saharien. Contrairement à la foggara de l’Albien, le débit de la foggara de l’Erg demeure stationnaire durant toute l’année; son eau est moins salée et de bonne qualité. Ce type de foggara se localise dans les oasis de Ouled Said (Timimoun). Actuellement, il existe une centaine de foggaras de ce type, dont moins de 80 sont fonctionnelles. Il est très difficile de connaître la longueur exacte de ce type de foggara; les galeries et les puits sont perdus sous les dunes du Grand Erg Occidental. Même les vieux oasiens n’arrivent pas à localiser le puits mère et même une partie de la galerie. À titre d’exemple, nous avons suivi la seguia principale des foggaras d’Ifli Nbara et Outakou (de débit respectivement égaux à 0,8 L•s-1 et 0,3 L•s-1) en partant de la kasria principale jusqu’à l’Erg et nous n’avons pas pu trouver l’origine de ces foggaras. Ce type est fortement menacé par le phénomène d’ensablement (BELLIL, 2002).


La foggara de l’Erg a ses caractéristiques propres, à savoir :
  • La longueur ainsi que le nombre de puits sont difficiles à identifier.
  • Il est difficile de trouver le puits mère de la foggara, vue l’impossibilité d’accéder à l’Erg.
  • Son eau est de bonne qualité.
  • Son débit est stationnaire dans le temps.
  • Les kasriates, les seguias et les puits sont couverts par des dalles rocheuses pour les protéger de l’ensablement .
  • La galerie est en zigzag dans l’Erg afin de diminuer les pertes de vitesse de l’écoulement à l’arrivée de la kasria principale.
La foggara de jardin

Ce type de foggara, qui n’avait pas encore été cité par la bibliographie technique, est une particularité du Sahara algérien. On a recensé sept foggaras de ce type dans la région de Timimoun, dont la longueur ne dépasse pas 1 km et les puits n’excèdent pas le nombre de 20. Il s’agit des foggaras d’Agalou (20 puits), Zahzaa (15 puits), Akraf, Ksar el Kadim1, Ksar el kadim2, Oukala (abandonnée) et Bouchouk (abandonnée).

C’est une petite foggara dont la longueur de la galerie ne dépasse pas les 1,5 km. Elle appartient à une seule famille localisée en aval d’une ou de plusieurs grandes foggaras albiennes (ou classiques) pour capter les eaux de drainage, d’infiltration et d’irrigation en provenance des eaux d’irrigation de la palmeraie et des jardins. Même les eaux d’infiltration en provenance des seguias et des madjens de la foggara classique sont récupérées par cette foggara. Ceci montre qu’il n’y a pas de pertes d’eau, toute la ressource est utilisée.

Quant à la distribution et au partage de l’eau issue de ce type de foggara, il est simple et ne demande aucune mesure ou calcul. La foggara n’est même pas équipée d’une kasria (peigne), l’eau en provenance de la galerie passant directement dans le réservoir (le madjen). Une telle foggara est équipée d’une petite kasria, un orifice qui se bouche avec un caillou recouvert d’un tissu et d’argile pour minimiser les fuites (une sorte de vanne). Pour réussir une bonne opération d’irrigation, on obture l’orifice par le caillou jusqu’au remplissage des madjens dans un délai acceptable

La foggara de source ou foggara d’ Al Ain (source en Arabe)
À la différence de la foggara classique, la foggara d’El Ain capte les eaux de source naturelle. On a recensé 15 foggaras appelées les Aayounes (pluriel de « Ain »), qui sont réparties entre les oasis de Moghrar (Naama), Beni Abbes (Bechar), Adrar, Beni Ounif (Bechar) et Boussemghoune.

Les oasis d’Adrar sont connues par leurs foggaras de type albien, à l’exception de la foggara de Hennou, qui est une foggara de source qui n’est pas alimentée par la nappe du Continental Intercalaire comme les autres foggaras de l’oasis d’Adrar, mais par une source d’eau naturelle et pérenne (OLEIL, 1994). La foggara de Hennou demeure une particularité de la région.

La découverte de la grande source d’eau naturelle dans l’oasis de Beni Abbes a été un événement pour les oasiens, qui l’ont reliée à leurs jardins par une galerie. Malheureusement, cette foggara, qui a participé au développement des palmeraies de Beni Abbes, se trouve aujourd’hui abandonnée.

Les palmeraies et les jardins de l’oasis de Boussemghoune dans la wilaya d’El Bayadh sont irrigués par neuf foggaras de source dont les eaux coulent toujours, mais les débits ont fortement diminué par rapport aux années quatre-vingt-dix. La source d’eau est desservie par une galerie souterraine qui permet à l’eau d’atteindre le jardin ou le ksar par gravité. Aujourd’hui, pour ce type de foggara, il existe un seul madjen collectif, contrairement aux foggaras classiques de type albien où chaque propriétaire possède son petit madjen .
La foggara de la montagne (nappe phréatique)
Ce type de foggara n’est plus en service dans le Sahara algérien. Les quelques foggaras qu’on a recensées se localisent dans la région de Bechar. La foggara de Djebel capte son eau à partir d’une nappe phréatique qui se recharge à partir des eaux de ruissellement en provenance des montagnes périphériques .
Ce type de foggara a beaucoup de similitude avec la khettara marocaine, la qanat iranienne et le kariz d’Afghanistan. La caractéristique principale de la foggara d’Al Ain est la variation de son débit durant l’année. En effet, c’est durant la période des pluies que le débit enregistre les valeurs les plus élevées, à cause de la recharge de la nappe phréatique. L’assèchement des foggaras s’effectue en périodes chaudes

Suite aux différentes périodes de sécheresses depuis plusieurs années et faute d’entretien, les trois foggaras de montagne qu’on a recensées dans l’oasis de Taghit se trouvent actuellement abandonnées. Ce type de foggara se localise au pied de Djebel Marhoma à Beni Abbes. Elle est caractérisée par une longueur de la galerie qui ne dépasse pas les 1 000 m. Elle est large par rapport aux foggaras de l’Albien

La foggara des oueds
Ce type de foggara capte les eaux des oueds, comme le falj du sultanat d’Oman. La longueur de cette foggara, creusée dans les sables grossiers des alluvions de l’oued, peut atteindre 1 500 m. C’est une foggara temporaire qui fonctionne en période humide en captant les eaux de la nappe d’inféroflux. Pour ce type de foggaras, le puits mère ainsi que les puits d’aération se trouvent dans le lit de l’oued, où les types de sols rencontrés sont généralement argilo-limoneux et parfois caillouteux . Elles sont vulnérables aux crues et à l’ensablement, les puits d’aération étant recouverts par les alluvions de l’oued lors des crues.

Aucune foggara de ce type ne fonctionne actuellement, elles sont abandonnées suite à leur effondrement et à l’assèchement des oueds. Ce type de foggara se localise dans les régions de Becher et Tamanrasset, dans les oasis de Lahmar

La foggara des crues

C’est une foggara particulière, unique en Algérie et localisée dans la vallée de Mzab dans l’oasis de Ghardaïa. Cette foggara est destinée à récupérer les eaux de crues; une fois collectée au niveau de la retenue appelée bouchene, l’eau est canalisée par quatre galeries d’une longueur d’environ 200 m, qui sont équipées d’une dizaine de puits d’aération .
L’eau se dirige directement dans les seguias qui alimentent les jardins, puis le surplus de la crue est récupéré en aval dans une retenue appelée ahbass pour réalimenter la nappe
Le partage et la distribution de l’eau d’une foggara
Une fois l’eau arrivée au niveau des jardins, son partage s’effectue selon deux méthodes : volumique et horaire.
La méthode volumique
Ce type de partage est le plus répandu en Algérie. Dans toutes les oasis à foggaras albiennes, le partage de l’eau s’effectue par la méthode volumique. Chaque copropriétaire est destinataire d’un volume d’eau déterminé en fonction de sa contribution à l’entretien et à la maintenance de la foggara. Cette répartition est assurée par les kasriates (pluriel d’une kasria). Le réseau de distribution est équipé d’un nombre de kasriates qui est proportionnel au nombre d’abonnés. Les kasriates sont disposées en forme de pyramide. À partir de la kasria lakbira (principale) , une sorte de bassin triangulaire muni d’un partiteur (peigne) reçoit la totalité de l’eau de la foggara et répartit le débit en trois, quatre et même cinq rigoles (seguias). À partir de la kasria principale, les seguias vont en éventail dans tous les sens. Au bout de ses seguias, d’autres kasriates secondaires répartissent l’eau puis d’autres prennent naissance et ainsi de suite jusqu’aux guemouns (les jardins)

La méthode horaire
Cette méthode de partage de l’eau, caractéristique des foggaras des sources, des montagnes et des oueds, est basée sur l’unité de temps. Le partage de l’eau s’effectue par le procédé horaire appelé nouba, c’est-à-dire tour à tour. Il est défini comme la durée de temps suffisante pour irriguer complètement le jardin. Le partage des eaux des khettaras de Tafilalet (Maroc) et des qanats (Iran) s’effectue selon le mode de la nouba. En Algérie, le partage de l’eau par unité de temps s’effectue actuellement pour les eaux des deux foggaras de Moghrar (Naama); il fonctionne de la même façon que celui des khettaras marocaines. La répartition de l’eau entre les copropriétaires se déroule tour à tour.

Dans la région d’Adrar, le partage des eaux de la foggara de Hanou, qui est une foggara horaire, s’effectue au tour à tour. Il n’y a pas de kasriates comme dans les autres foggaras avoisinantes. Des seguias relativement importantes partent directement d’un grand madjen (réservoir). La foggara est obstruée une à deux fois par jour pour permettre de reconstituer le niveau requis, puis l’eau est libérée pour un temps donné, proportionnel à la contribution financière versée par le bénéficiaire (OLEIL, 1994).
Répartition des foggaras dans le Sahara algérien
Aujourd’hui, personne n’est en mesure de déterminer le nombre exact de foggaras fonctionnelles en Algérie. Cependant, pour cette première étude de prospection sur le terrain, nous avons pu estimer leur effectif à environ 930; elles sont classées selon sept types qui se localisent autour du Grand Erg Occidental .
Ce chiffre reste approximatif pour des raisons techniques; des foggaras sont abandonnées chaque année, d’autres réhabilitées, soit par des agriculteurs, soit par les services locaux. Pour les foggaras de l’Erg, il est impossible de donner un chiffre exact, puisque plusieurs foggaras sont sous le sable du Grand Erg Occidental. Nous avons trouvé des traces des foggaras dans certaines régions, mais il était difficile d’estimer leur nombre.

Conclusion
La technique de captage et de distribution de l’eau connue par les galeries drainantes sous différentes appellations (kariz, qanat et khettara) est pratiquée dans plusieurs pays arides et semi-arides depuis plusieurs siècles. Cependant, malgré le point commun qui est la galerie horizontale, cette technique présente des différences en ce qui a trait à la nature de l’eau captée et du mode de partage des eaux entre les copropriétaires selon les pays. Dans le Sahara algérien, notre étude révèle l’existence de sept types de foggaras. Si les foggaras des sources, des montagnes et des oueds ressemblent bien aux aflajs du sultanat d’Oman, à la khettara du Maroc et aux qanats iraniennes, les foggaras de l’Albien, de jardin, de l’Erg et des crues sont cependant des techniques propres aux oasis du Sahara algérien.

Localement, si la foggara de l’Albien est le procédé le plus répandu, avec un effectif de 890 foggaras fonctionnelles sur les 1 400 inventoriées, la foggara des crues est unique au monde avec toutes ses particularités, notamment les modes de fonctionnement et la distribution de l’eau. La foggara de jardin est un modèle de la gestion rationnelle de l’eau dans une région aride. Au nombre de six, les foggaras de jardin creusées en aval des grandes foggaras de l’Albien dans quelques oasis de Timimoun captent uniquement les eaux d’infiltration et de drainage des eaux d’irrigation en provenance des jardins en amont.

Seuls quelques vieux oasiens de la région de Timimoun connaissent le secret de la naissance de la foggara de l’Erg, au milieu des immenses dunes de sables du Grand Erg Occidental.

Si aujourd’hui l’eau coule dans ces foggaras, c’est grâce à l’ingéniosité des oasiens; malgré leurs moyens rudimentaires, ils ont su capter les eaux cachées au-dessous du Grand Erg Occidental, issues d’une nappe qui n’a toujours pas été quantifiée.

Auteurs : Boualem Remini,

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