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6/26/2014

Il était une fois Blida Une sentinelle d’Alger

Pour l’histoire, Blida est un sujet peu accessible en raison des sentiers battus et de la quantité de légendes qui parsèment son parcours depuis sa naissance, il y a 475 ans.

C’est une ville très jeune, comparée à ses aînées depuis Annaba jusqu’à Tlemcen. Elle a évolué dans un rythme soutenu sur le plan urbain et assuré une mission de sentinelle qui veille sur Alger par le côté sahélien. C’est ce qui explique son destin de ville garnison depuis l’époque ottomane. Elle est le siège de la 1re Région militaire. La rose fait sa réputation, mais c’est aussi une ville industrielle dédiée à l’agroalimentaire bien avant la colonisation française. C’est une ville universitaire et touristique avec ses parcs nationaux, en particulier Chréa réputé pour sa forêt de cèdres, son climat et sa station de skis accessible par téléphérique. Elle a donné de grands noms au monde sportif, à la musique et aux arts graphiques.
Mais elle n’a sûrement pas surgi du néant comme on le dit si souvent. La fortune du site blidéen est étroitement liée à ses ressources et à sa position géographique sur l’axe qui traverse l’Atlas tellien donnant accès au Titteri. Le territoire appartient à l’ensemble que forme la Mitidja, une plaine fertile avec un taux de précipitation annuel de 800 millimètres, d’où résulte un environnement climatique favorable à toutes les spéculations. Les essais de cultures les plus variées ont été couronnés de succès dans ce microclimat, y compris la canne à sucre et le riz à Oued El Alleug. Chréa domine la ville du haut de ses 1500 mètres. Assez régulièrement vers décembre, la montagne revêt son manteau de neige.
Il n’est pas rare que la ville se réveille bloquée par une épaisseur de plus de 60 cm. Ici, nous sommes au royaume du cèdre, l’incontestable roi de toutes les espèces végétales. Le cèdre de l’Atlas blidéen peut atteindre 45 à 50 mètres de haut sur dix mètres de circonférence. Vigoureux et superbe, il est le témoin du temps et peut vivre plusieurs siècles. Certains spécimens ont atteint le millénaire. C’est le cas du «Chameau», ainsi nommé en raison de sa forme qui rappelle l’animal. Suprême dans sa beauté et son gigantisme, le cèdre n’est, malheureusement pas apprécié à sa juste valeur. Pour des considérations d’intérêt immobilier, ce seigneur de la forêt fait, parfois, des rencontres tragiques avec des bras armés de tronçonneuses. Sur les 15 000 hectares que compte la cédraie, il y a de très nombreux spécimens qui ont «vu» la naissance de Blida.
Entre le peu de choses que cette rose éphémère et le cèdre majestueux, dominant les siècles qui passent, Blida s’est choisi une identité de «Ville des Roses» et non du cèdre. Le mystère de ce choix est sans réponse.
Que reste-t-il de la Préhistoire ?
Le sol blidéen ne semble contenir aucun gisement préhistorique, aucune trace humaine ancienne, ni outil, ni escargotière, ni gravures rupestres. Les Romains n’ont pas osé s’y installer. Les spécialistes s’étonnent qu’un tel site qui fût sans doute riche en gibiers et prédateurs avec un sol humide, si favorable à la vie, propice à la récolte d’escargots, de fruits sauvages et champignons n’ait pas attiré des groupes humains ou des humanoïdes dès les temps reculés de la préhistoire. Ce mystère semble s’expliquer par la conjugaison de deux facteurs : l’espace habitable a évolué très vite depuis le XVIe siècle et n’a pas fait l’objet de prospections par les services spécialisés, notamment dans les cahiers des charges des grands chantiers de la ville.
Même quand le sol est remué sur une grande profondeur comme c’est le cas, aujourd’hui, à l’entrée du boulevard des 20 mètres. Une grande profondeur comme c’est le cas, aujourd’hui, à l’entrée du boulevard des 20 mètres. D’autre part, le sol superficiel de toute la zone est soumis à une érosion régulière par les crues qui dévalent des piémonts à travers un ruissellement abondant en hiver. Ce lessivage en surface ne laisse aucune chance à la survie des traces laissées par l’homme. Il est cependant assez certain que l’homme préhistorique a bien fréquenté cette région puisqu’on a retrouvé des ossements et des outils dans une grotte non loin de là sur la côte vers Aïn Benian, à moins de 15 km à vol d’oiseau. Par ailleurs, la toponymie locale atteste très fortement de la présence humaine lointaine.
Les noms de lieux sont en majorité protoberbères, parfois puniques et indo-européennes. Le nom de Chréa formé de «ker» est composé des mêmes consonnes de Guerouaou, Gouraya, Iguerguer ou Djerdjera. Quant à Tamesguida ou Tabenkort, d’origine puniques laissent entendre un lieu d’anciennes divinités. Nous retrouvons aussi «Tala ascha» sur les hauteurs de la ville, un hameau près d’une source qui rappelle Thalassa des Romains. On sait combien ce peuple guerrier appréciait les thermes. Pour ce qui est de l’occupation romaine, une rumeur qui court depuis l’époque coloniale fait état d’un buste en marbre découvert lors des travaux d’un puits à l’entrée de la ville, au quartier Benboulaïd. Mais personne n’a jamais vu cette découverte qui doit être imaginaire. Donc, les Romains ne se sont pas intéressés à cette zone de la Mitidja et ne pouvaient pas, pour des raisons stratégiques, construire un camp ou une ville adossée sur des piémonts incontrôlables militairement avec une visibilité limitée d’où pouvaient surgir les ancêtres des Beni Salah.

Rachid Lourdjane

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